La toile de l'un

Emmanuèle Gabrièle

Emmanuèle Gabrièle

 


Plonge le soleil,  son disque d’or et doux

Dans l’infini camaïeu des gris pâles

Toute la nostalgie heureuse de l’hiver
Déjà du côté des jours à venir, de la lumière
De l’herbe crue, de la pierre tendre et incrustée

S’offre Le banc  au voyageur de l’instant
Une poésie nichée là,  tend la main
Ramasse des mots au creux du moment

Tandis que l’hiver étend son froid et sa nuit
Sur le jardin et l’espace infini

La maison heureuse et solitaire
Tend la main et allume ses lampes
L’hiver craque, ses branches mortes
Tapis de bruits secs au pied du tilleul

Toi, tends la main vers l’âtre
Que  jaillissent les flammes
Elles donneront  à la demeure
La musique du soir

***


Je suis arrivée sur la plage au moment du festin des mouettes

J’ai marché le long du festin, entre dunes et lumière

Étendue immense

Là-bas, proche et lointain
Le Mont

Tu es là dans mes pensées, la main dans la mienne
Tu me guides vers le cloître céleste

Sur le sable, les pattes de mouettes
Le festin s’est tu
C’est un calme infini qui veille sur nos pensées

***


Je le connais ton silence
Je rentre dedans
Et tout ce qu’il ne dit pas
Et que je ne connais pas
J’en fais ma maison

***


Je n’ai pas écrit cette semaine
Les miettes sont restées sur la table
La poussière dans l’escalier

Un rêve de clown, silhouette égarée
Au bout d’une rue obscure
Et mon sac à peurs et à pleurs
Bien rempli contre mon oreiller
Je n’ai pas écrit cette semaine

***


Dans la semi-obscurité les mots s’absentent
Aux portes de la nuit, l’infini beauté du monde

L’oiseau passe son ombre chinoise
S’étalent les couleurs du ciel
Texture douce et charnelle

Et le défilé des automobiles
Dans la vallée fait son cordon de bruit
Et le puits immobile, on dit qu’il est profond

Derrière, le pré s’affaisse et fait le nid des orties
Vrombissement d’une pétrolette
C’est comme un trait sonore  et haché sur le paysage

Et le nuage immense entre village noir
Et mémoire de l’azur d’où le bleu se retire lentement

L’horizon se couche et ploie sous le soleil éteint
La nuit fait son entrée

Quand je relirai ces lignes
Puissent mes pauvres mots me relier
À ce lieu, à ce temps que je ne cesserai jamais d’aimer
Infiniment
Jusqu’aux portes de ma nuit

***


​Des arbres seuls voyagent
Sous le vent
Des mots jusqu’à la corde usés
Et pourtant
Il y a des cerfs-volants
Dans ma voix qui se tait

 

© Emmanuèle Gabrièle pour l’ensemble des poèmes de cette page

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