C’est un trou de verdure où dorment inusables et colorés : sacs, canettes, serviettes, paquets, gobelets.

La jolie rivière coule et pue Constantin Kaïteris impression typographique Atelier du Hanneton, 2011 ISBN 978-2-914543-22-1 16,00 €

Il en est de la poésie comme de bien d ’autres formes d’expression artistique. On lui colle certaines représentations qui font clichés. Par exemple, on lui associe une certaine idée du beau, voire du joli. On l’associe à la nature quand ce n’est pas à la Nature avec ses petits oiseaux qui gazouillent au printemps et ses sources chantantes. Voilà un livre qui bouscule ces images avec un brin d’humour grinçant sous lequel perce le désarroi et le désaccord. Pour bousculer ces images factices, des poèmes, boulets de trois vers, pas haïkus mais presque, qui font images réalistes. Une preuve s’il en fallait que la poésie naît aussi (surtout) de l’observation minutieuse du réel dont elle s’empare pour dire beaucoup en quelques mots, faire image et dénoncer plutôt que renoncer. En une soixantaine de textes brefs, Constantin Kaïteris fait le constat des désastres que fait sur notre monde ce que l’on appelle parfois le progrès. Pollution, mondialisation, surexploitation, exils, abus en tous genres qui asservissent la planète et ses habitants, rendant plus riches les plus riches, plus pauvres les plus pauvres, bâclant toute réflexion au profit de la perte du sens et des valeurs. Un livre salutaire qui dénonce mais pas seulement. Un livre qui nous appelle, dans ses constats, à être plus civils et responsables, redécouvrant ce que nous sommes : des humains respectables, tous, sur une terre à respecter, toute.

Alain Boudet