21 poètes pour cette anthologie amoureuse…
Elégie
Je t’ai cherchée
Dans toutes les robes, dans le vent,
Dans les couleurs des couchants,
Dans mes moments qui ne servaient à rien,
Dans l’espoir toujours
Dans la terre qui monte
Dans un tremblement
Guillevic – Sphère 1963 |
Lumière
Ce n’est pas vrai
Ce n’est pas vrai
Ce n’est pas vrai
Quand nous voyons à deux
Ce n’est pas vrai
Quand les forces qui montent
Ce n’est pas vrai
Quand nous mettons à deux
Ce n’est pas vrai
Quand le plus grand combat
Ce n’est pas vrai du tout
Quand la même colère
Quand ils font de leurs jours
Guillevic – Gagner 1949 |
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Je t’embrasse pour brasser ma chair dans ton regard
Pour brasser ta chair de ma langue Là, mes yeux dans les yeux d’Audrey. Je regarde loin dans ses yeux. J’essaie de me souvenir, de tomber par les orifices de son nez, délicat. Par ses lèvres, délicates. Cet ombrageux noir de ses yeux que j’essaie de remonter au plus loin. Le point aveugle de ses pupilles que j’essaie de monter délicatement pour faire une place à la phrase suivante. Dans les yeux borgnes, dans les yeux aveugles d’Audrey.
Même si tu étais là, même si je te touchais, j’aurais peur que tu ne t’évanouisses à travers mes doigts Il y a cent ans, la terre de ma terre
Seyhmus Dagtekind |
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Dans quel autre monde dis-moi dans quelle autre vie crois-tu la rencontre de nos silences réveillés aux bruits du matin et dans quelle autre nuit ta joue ronde sous mes doigts lune dévêtue Jacques Brault |
Refuge intime
Quand on pense l’autre © Bénédicte Lemale-Tonnevy |
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Tu parles parles tout le temps la pluie le beau temps tout y passe je t’écoute t’écoute toujours. Tous ces mots qui remplissent l’air sais bien qu’ils vont vers moi même si c’est pas tous des mots d’amour toujours je sais bien qu’il y en a dedans.
Eclat de rire comme verre brisé contre les murs partout tu le lances avec la voix offerte au jour qui passe quand je rentre des fleurs à la main dis que tu es contente qu’il vient de loin ce rire de très loin de l’enfance ou d’avant encore tu ne sais plus très bien que les fleurs ça te touche beaucoup. Je n’ai jamais pu regarder plus loin que toi.
Franck Cottet |
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La joie naît de ton rire
Le jour Quelle conscience
Qui donc Qui donc écrit ici je Qui le prononce Où est l’esprit © Patrick Joquel |
Deux baisers se promènent en volant à tire d’aile deux baisers doux de duvet tendre où vont-ils ces baisers légers
j’ai vu deux baisers volants baisers baisers de cœur où allez-vous ?
nous cherchons où poser notre nid © Luce Guilbaud |
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Tu es belle Je te vois pour la première fois tu es belle tu sais je ne connais que toi depuis toujours je savais que tu serais là et j’attends tout de toi comme la feuille au seuil des automnes ne renonce j’attendais, des filets aux fleuves fous ta lumière je ne connais que toi bien avant de naître je t’entendais battre, essentielle, dans un temps qui n’est pas celui des autres un temps fait pour accompagner nos pas je ne connais que toi je veux respirer par ton souffle par ton souffle je veux chanter que tu es belle parmi les belles je veux suivre sous mes doigts, le grain, la courbe de tes paupières dans ma nuit ma main cherchait ta peau je veux atteindre tous tes rivages toutes tes clairières insoupçonnées tu es belle, j’ai soif, j’attends les pluies, les ciels exhalés qui te vêtent je veux voir l’aube plurielle se dresser entre tes bras que nous y buvions ensemble mes lèvres réclament leur droit d’asile je veux connaître les replis de tes herbes odorantes je te veux menthe, mante, amante, amande âcre au corps du fruit je veux te montrer la mort sur mon cou et sur ton cou laisser la trace de mes doigts par ta peau multipliés je te veux fildefériste, sur le rasoir des infinis vêtue du parfum des songes natifs, je te veux parmi les tiens, les astres, luxuriante, des axones aux galaxies insatiables il sera désormais toutes les heures irremplaçables, je te veux champ d’orges à moisson tendu de couchants imprenables, étamine ténébreuse au bord tangible des aurores , je veux des gorgées de toi, des fontaines effanées, des fêlures dans le vibrant des veines, des feulements de bêtes épuisées et comblées follement Je te vois pour la première fois Demain quand je m’avancerai le long des rues anonymes d’une ville trop grise je veux que chaque fenêtre me redise ton visage et je parlerai aux fenêtres je te le jure je parlerai aux fenêtres je leur dirai … demain je saurai ton nom et toutes les résonances du monde te scanderont à l’unisson tu seras le il te poussera des fruits je serai le paradisier, il me poussera des rémiges irisées © Gérard Cousin |
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Main dans la main, Nous devenons fougères, Rêves d’arbres fleuris.
Main dans la main © Christine Guénanten |
(léo et léa)
Tu me vas bien. Dans ta grande veste et tes bras, © Françoise Lison-Leroy |
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Il suffit d’un regard, d’un geste, d’une courbe
dans l’été, d’un sourire dans le givre, pour que tout s’efface : la vrille, l’étau, le fer. La pulpe alors, le fruit, l’élan, le don. Du coeur, de l’âme, de la force qui porte par-delà le gris. Pourtant rien n’est dit dans le bruissement des lèvres, des abeilles qui butinent. Pour nous, seuls, le miel, le bonheur d’être. © Jean-Noël Guéno |
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un poème © Sophie Braganti |
Mon amour m’abandonne qui tenait mes nuit mes jours
on va vivre en automne Apollinaire a chanté mieux
de l’eau des heures © Olivier Bourdelier |
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8 Des chants et du bruit nous parviennent du dehors par les persiennes juste tirées. Les cris entendus au loin proviennent des enfants lâchant des pétards, incendiant des feux d’artifice. Ma charnelle sous le faisceau des soleils légers tu clames ton office et célèbres des odes où se déversent dans l’univers en vase clos des coupes de lait des verres d’eau. Je trouve la faconde et déclame des discours, aux poissons chats, aux crabes tambours, un irrémédiable vendredi de partage. Je donne et tu prends, resplendissante de ces gestes nerveux, le torse d’un éclat de lumière percé. S’esquisse Delacroix dans tes recoins propices aux secrets. Le pardon ganté de merveilles, jette sur les morts le drap blanc. Je remonte le fleuve aux commandes de navires à aubes lentement défile ce parfum des ruines incendiées. Sur la terrasse un lion danse sous la pluie, ton oeil revolver photographie la soif des hommes. Au rythme du staccato, des tambours branchés sur nos vies nos peaux se cherchent, et les verres de rhum bercent les corps ivres des captives de Guinée. © Saïd Mohamed – Femmes d’eau (extrait) paru dans Polder |
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Dans ta voix d’enfance cueillir à tes lèvres sans rature le rouge de la forêt * Froid annonciateur * Toi loin devant *
Ordre monacal du jardin *
Autour d’eux le silence * Ils glissent maintenant
Anne-Lise Blanchard |
Lettre sans réponse
Souhaiterons-tu vieillir ensemble
Suivrons-nous nos voies immobiles Garderons-nous toujours intacts
Reprendons-nous souffle et courage Demanderons-nous au destin de patienter
Trouverons-nous enfin l’apaisement Emprunterons-nous lentement
Continuerons-nous encore à nous écrire © Georges Cathalo |
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L’époque des coquelicots
C’est à l’époque des coquelicots Leurs enfants naissent aussitôt, penser oiseau parler chemin écrire coquelicot. © Alain Serres |
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Ne me réveille pas dormeuse de ce geste instinctif vers ton épaule ne me réveille pas c’est mon dedans qui te reconnaît
même la jouissance la plus nue © Marie-Claire Bancquart |
La fraîche rumeur d’une abeille où l’été se désaltère, Quelques mots sur ta peau pour la mémoire des doigts Un autre printemps pour offrir un rire à l’espérance Des paroles assez vives pour enflammer le soleil qui te regarde O ma captive © Philippe Mathy |
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Pour P.O.
J’ai voulu imaginer l’absence. Je n’ai pas réussi. Pas pu. Ainsi je suis vide de l’absence de toi.
Je suis l’eau vive et sa mémoire s’argente au reflet de l’absence vide de moi. Je suis joie de savoir attendre de pouvoir marcher dans la lenteur du jour dans l’incandescence de la nuit vide sauf du silence de toi. J’ai imaginé la musique de l’absence. Cela s’est mué en une ultime sonorité : je suis . Je suis comme nacrée, comme sacrée, comme créée dans l’énoncé ivre du vide. Absence n’a pas de sens pour les nôtres . j’ai le projet d’éprouver ce que vivre pleinement veut dire. Comme toi. Avec toi. De nos absences physiques il restera toujours la trace, l’empreinte de nos connivences, de notre confiance . Un lien que la foi en l’autre ! Un lien qui va de ma main à la tiédeur de ton corps, intacte par la seule force de l’évocation. Dissipé, dépouillé, gommé, évaporé le mot absence. De détours en enchaînements, tu me seras toujours restitué , tu passeras dans mon souffle, Et dans le son réconcilié de ton prénom, la prédiction du mien . A la traîne du vent, impossibles à démêler, étreints. Ce qui tournoie possède le plus sensé qui soit : l’amour qui perçoit notre envol. Epaves et dédales ne pourront rien contre nous. L’avancée palpite à deux cœurs. Une retraite dérobe l’absence à nos yeux émerveillés. Les ailleurs de nos consciences dévalent des sentiers sans jamais perdre d’altitude . Sans doute nos destins ne sont pas communs, mais nos frissons : oui. Pour tout te dire de ma compréhension : la prise en charge de l’oubli ne permet pas à l’absence de prendre corps en moi. Tu peux suspendre ton geste ou franchir mon seuil, dans tous les cas tu demeures. Voilà : J’ai imaginé créer une maison de mots, une maison de chair, autour de toi à ne jamais sacrifier sur l’autel de l’absence. © Béatrice Machet |