petites bêtes

petites bêtes

… et si on cherchait la petite bête, avec les poètes ?


Ayant perdu
Ses deux L
Le papion
Se retrouva
En maison
De retraite

© Béatrice Libert

 


Obscur et mal aimé
Le cafard
Rêve d’une réforme
Orthographique
Lumineuse
Qui le muerait
En caphare

© Béatrice Libert

 

Le bousier

Pas de baiser
pour le bousier
son nom t’inquiète
son nom t’affole
tu n’oses pas

Dans le sous-bois
il roule sa boule
pédale, s’affale
​et recommence

Ose donc le prendre dans ta main
ferme le poing
bien doucement


Et tout soudain
tu sens qu’il roule
dans le silence de ta paume
une caresse.

Alain Boudet
Saint-Benoit, août 2014

 
Ce soir j’ai compté
il manque un ver luisant au jardin
peut-être s’est-il caché
le hérisson l’aurait-il dégusté pour y voir
plus clair lui qui ne sort que .la nuit
les escargots font la fête
et un chat noir et blanc a disparu dans l’ombre.


On annonce
des amours égarés
un ver luisant absent
trop d’escargots
un chat perdu

et alors
pour un sourire
c’est où ?

C’est que les vers luisants
maintiennent le jardin en place
avant que cela ne turbule.

Colette Andriot
(inédit)

 

 

lendemain de pluie
de limace en limace

mes p’tites foulées

Isabel Asunsolo

Aïe !

Qu’elles soient d’eau douce
ou de mer,
qu’on les trouve au marché,
qu’on les ait à l’oreille,
qu’on les cherche à quelqu’un
ou qu’on les lui secoue,
vampires nains
dans la jungle velue
des corps de mammifères,
à petits sauts et sans souci,
elles se piquent
de piquer
les puces.

Paul Bergèse

La tortue a disparu sans laisser d’adresse
le lézard vert est mort sous les griffes du chat
les araignées rouges assassinent les roses
le merle et la merlette ont achevé leur nid
les coccinelles se gavent de pucerons

au matin rien n’étonne plus le jardinier
qui lit les faits divers sanglants dans son journal

aux quatre coins du jardin – Éditions Donner à Voir

Joel Glaziou
​extrait de Aux quatre coins du jardin
© Donner à Voir

 

Moustique

J’ai lu
Dans une revue scientifique
Que le moustique urine
Pendant qu’il nous pique
C’est un enfoiré de première
(Heureusement qu’il n’a pas
La taille de l’éléphant)
Mais on va pas se laisser piquer
Sans réagir
Pas de pitié
Sus à ces insectes ailés
Tapons
Cognons
Faisons un carnage
Traquons ces petites bêtes
Abusons de la tapette
Sortons les flingues
Car
Se faire sucer le sang
Et pisser dessus
En même temps
C’est vraiment

     Dengue

Salvatore Sanfilippo (inédit)

  Libellule d’un bleu
d’après nuit,
dans tes yeux mystiques
rêve la douce rivière.
Je n’approche de toi
qu’à la force de mes mots
et tu replies les ailes
sur ton qui-vive,
par crainte
de la première parole.

Libellule bleue
sur la pointe d’une herbe folle,

c’est le poids plume
de mon âme
qui s’y pose.

Jean-Albert Guénégan

 

La fourmi porte sur son dos
des petits sacs de nuit
mine de rien
mine de plomb
elle brouille ses ombres
de poudre de charbon
elle enterre nos soucis
un à un en suivant ses sœurs.

Luce Guilbaud

 

Le scarabée dans la poussière

Si loin en avant
qu’il n’y a plus de lisières

et la flèche n’atteint pas
parce qu’il n’y a plus de cible

ira-t-il jusque là
le scarabée qui s’affaire dans la poussière

dos luisant pattes arquées
à tracer des mots

Françoise Hàn

  Une grenouille
agronome
agrémente
d’ingrédients graves
le grincement
des gravillons.

 

Une phalène
farfelue
fabrique
furieusement
des folies douces
et des fadaises
au firmament.


Au fond
faut-il feindre
d’être fin
pour être pris
pour une fourmi ?

Claude Held

 

Une phalène
farfelue
fabrique
furieusement
des folies douces
et des fadaises
au firmament.

Jacqueline Held

  tu as beau frôler
le rêve en plein vol
attention ma belle
que tu sois
libellule
œil de bulle
ou bien demoiselle
œil de ciel
c’est tout pareil au bec
du léger faucon hobereau
ton gourmand prédateur.

Patrick Joquel
(inédit)

  Dites ce que vous pensez des insectes.

Est-ce que les insectes pètent ? Moi, je crois que oui. Mais ce n’est pas correct, car ils le font en douce, dans l’herbe et sous les feuilles, et ça résonne, de part en part, très loin. Les petits scarabées pensent que c’est l’orage, ils ont peur, ils ferment leurs écoutilles et se recroquevillent sous les brindilles, leur mère les rassure, elle sait, mais leur cœur bat très fort, et ça résonne, de part en part, très loin. La courtilière entend le grondement sous terre, elle a mangé trop de carottes et de navets, elle pète à son tour, et ça résonne aussi, dans ses galeries, de part en part, très loin. L’araignée d’eau respire avec son cul, elle le met juste à la surface et aspire, et redescend avec l’air et le pète dans la bulle où elle habite et guette ses proies. Le fourmilion lance des grains de sable sur les fourmis qui passent au bord de son trou, pour les faire tomber, on voit seulement ses pinces, et les grains qu’il pète sur les imprudentes. Voilà, j’ai répondu à la question sur les insectes.

Raymond Jacq
Fantaisie n° 6234

 

Au village
la buraliste me salue
le lézard me fuit.                                

D’une danseuse nue
le papillon errant
suit les arabesques.                                                       

Jour des morts
le châtelain ruiné
le moucheron vif.

Entre les pages
du vieux Maigret
un bébé cloporte.

De ma paume
le scarabée cherche
la sortie.

Christophe Jubien

 

L’araignée

L’araignée aussi veut
chanter son Dieu.
Elle fait de son mieux
en lui offrant sa toile
et sur la nudité
de la croix pose un voile.
Elle, petite, crochue, noire
s’absente.
Seule son oeuvre transparente
laisse voir
la trace sanglante
au vitrail de gloire.

Nicole Laurent-Catrice
Centre Saint-Jean, 2003

 

L’enfant sourit
sur l’épaule
un papillon.

Ghislaine Lejard

 

Poète à pied

Les escargots sont des héros
ce sont de grands mangeurs de poèmes
et de laitue sais-tu
que dans l’équation de leur coquille dans le calcul de
leur caravane sur leur dos ils transportent le poids du
monde
et ses mystères à hélice les escargots sont des héros
Même tes chagrins
ils les portent
sans rien dire
en silence
ils calculent
l’exact poids de tes sanglots
C’est pour cela qu’ils en bavent car
il n’y a pas
que les hommes
pour en baver
Il y a aussi les amateurs
de laitue de poèmes
et parfois ce sont les mêmes même
s’ils n’ont pas tous l’air
d’escargots

Roland Nadaus
Les escargots sont des héros
Éditions Soc et Foc

 

Luciole

Un dimanche
Ramasser
Une luciole
Ne posséder
Rien de plus


Grillon

Sur la queue d’une étoile
Un grillon se fraye sillage
S’ébroue dans les écumes
Frappe au ciel la mesure                

Hanneton

Un hanneton dévisse l’air
veut évaporer un moustique
deux ou trois bouses le trahissent
sa chemise rouge crépite

Jacqueline Persini-Panorias
(inédits)

 

Lucarne

Par une lucarne
sur la pointe des mots,
je jette
une lettre

et un lucane
erre
de nouveau
sur un trottoir, là,
au chaud du cœur, comme

un bémol
au vol des mouches,
des taons
et des heures

    écrasés
    d’ennui,
    le nez
    aux vitres.

Morgan Riet
(inédit)

 

Mademoiselle Limace


Vous faisiez moins la fière
à traîner le pied dans la boue

belle déjà
épaisse et rouge jadis

musclée comme la langue
qui se mêle à la langue
ô baiser

que vous faisiez limace
dans l’ornière
à l’orée de la forêt
vous n’aviez lors

pas un regard à m’accorder
à l’époque il est vrai
déjà j’étais crapaud.

Claude Vercey

  Pour voir
sa voisine
la chenille
qui se dandine
dans sa nuisette
le perce-oreille
vient de trouver
une combine

Dans sa noisette
comme un œuf
en douce
il creuse
un œil-de-bœuf

Jean-Claude Touzeil
Remontants et ricochets – éditions Soc et Foc)

 

Pique-prune

Le pique-prune
en arc de lune
croît et vit en
catimini
dans de vieux chênes
percés à peine

Rare à ce jour
ce scarabée
est protégé
et interdit
à l’autoroute
d’avancer comme
prévu sans doute

ça fait l’affaire
des écolos
et des autos
point de péage
me dit un sage
et sans rancune
car l’autoroute
est pique-sous
bien davantage
que pique-prune

Joël Sadeler
Les animaux font leur cirque

 

Luciole

si tu veux la voir
je te la montre
éteins la lumière

trop tard

dans la boîte de mes mains
elle ne met plus son clignotant
pars  lui chercher un mâle
pour la rallumer
et la faire tourner
à droite
à gauche
en rond
en bourrique

ps : en mai prochain pour les lucioles je garde mes mains dans mes poches

Sophie Braganti

   

 

Formulaire de contact