Autre méthode d’ouverture
Ouvrir
le dictionnaire
et fixer de nouveau
le mot « miroir »
droit dans les lettres.
Après quoi, en poursuivre,
selon son inclinaison, les reflets
plus ou moins nets
qui nous viennent sous les doigts.
Et de la sorte dériver, dériver-
l’esprit radeau-
tant et plus,
plongé dans la brume
épaisse du volume en main-
et tout cela,
en espérant qu’au moins
l’un de ces poissons d’encre,
qui y dansent
en tous sens,
voudra bien se laisser surprendre
au-delà de ce jeu.
Toi, moi, miroir, etc.
Morgan Riet
Édition : Christophe Chomant Éditeur, avril 2024
ISBN : 978-2-84962-586-6
Prix : 16,50 €
Le photographe Cédric Cahu propose à Morgan Riet d’engager une « réflexion sous toutes ses formes » à partir de ses photographies. Le poète tente d’appréhender, à sa manière, sous différents angles, les multiples sens qu’il est possible de donner au mot « réflexion ».
Qui réfléchit ? Les images du miroir qui réfléchissent celui qui s’y regarde et le réel qui l’entoure ? Les images produites par les photographes qui sont les reflets d’un instant passé et disparu ? Le regardeur qui entame une réflexion sur ces images ? Un dialogue étrange et ludique s’instaure entre les images et celui qui les regarde.
Le poète pratique ce qu’il appelle « l’esprit radeau » c’est-à-dire la dérive sur les mots du langage. Il joue avec les homophonies (on panse/on pense) et les mots-valises (une « expensée » naît d’un poème en expansion). Il procède par rebonds sonores (locomotive/leitmotiv), il prend une expression au pied de la lettre (où se cachent les bœufs quand il y a un vent à décorner les bœufs ?), il prolonge une liste de choses à faire jusqu’à l’absurde (pense-bête du jour). En procédant par dérives successives, Morgan Riet étend son domaine de réflexion pour faire surgir des images inattendues et inédites du réel. Esprit sérieux s’abstenir.
Michel Foucault