PRÉSENTATION
C’est en Haute-Savoie que j’ai, pour la première fois, découvert, inattendus, ces carrés de jardins, posés, là, aux cœurs des étendues de pâturages. Souvent, légumes et fleurs s’y côtoient.
Surprenants jardins.
Ils m’ont donné l’envie de bêcher les mots de montagne que je possédais, pour les aérer, les alléger, les retourner comme des pierres, y retrouver les mots cachés, oubliés ou perdus, y rencontrer des mots nouveaux.
Puis, comme le jardinier ordonne son carré de cardons, de tomates, ou de salades, cinq lignes de cinq pieds, au creux de la page, j’ai planté mes “carrés de montagne” en cinq vers de cinq pieds.
Pour rester dans le sein des carrés, j’ai rassemblé ici vingt-cinq jardinets réalisés avec les mots cueillis et recueillis dans mes labours de montagne. Ils vous offrent leurs couleurs, leurs odeurs et leurs musiques
nouvelles.
Paul Bergèse
Voici quelques extraits
OEIL
Au donjon du noir,
écorce de plumes,
tanières de lune
et reflets de proie,
le hibou surveille.
MIDI
Au vif du soleil,
alanguie de chaud,
au coeur du pierrier,
attentive à l’ombre,
la marmotte veille.
SERENADE
Dès l’entrée d’automne,
en tombée de nuit,
sous la feuille morte,
le grillon violone
sa mélancolie.
CONFIDENCE
Les flancs arrondis
du galet nous masquent
ses pensées cachées.
Il garde en son coeur
ses angles aigus.
DON
A l’écart des jours,
sur le rocher nu,
le lichen accroche
un peu de sa vie
pour la vie des autres.
SAISON
Soleils éclatés,
des forêts d’étoiles
peuplent les rochers.
L’éboulis fleuri
enflamme la faille.