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La eraMi padre y yo dormimos en la era, y la paja nos es lecho de estrellas. Se sienten las culebras cruzar toda la noche los haces de cebada, y ratas como gatos nos roban en el trigo. Me estremezco y no grito, porque mi padre ronca bebiéndose la luna, y en el aire cantan grillos de arena. Juana Castro (Del color de los ríos) |
L’aireMon père et moi dormons sur l’aire, et la paille nous fait un lit d’étoiles. On sent les couleuvres traverser toute la nuit les bottes d’orge, et des rats comme des chats nous voler (volent ?) dans le blé. Je tremble et ne crie pas, car mon père ronfle buvant la lune, et dans l’air chantent des grillons de sable. Pratique ancienne : après la moisson, sur l’aire, on faisait la « trilla » ou battage pour séparer le grain de la paille. Traduction Dany Fontaine |
AgacharseSentir el peso cálido. Girar previsora la vista, y saber que no hay nadie. Agacharse. Enrollar el vestido, dejar en las rodillas la mínima blancura de la tela, su felpa y el fruncido que abraza la cintura y las ingles. Mojar con el chorro dorado, tibio y dulce la tierra tan reseca de agosto, el desamparo sutil de las hormigas en la hollada palidez de los henos. Mezclar su fragancia espumosa con el verde vapor denso de mayo, sus alados murmullos, la espantada carrera de los grillos. Y en invierno, elevar un aliento de nube caldeada, aspirando el helor de hoja fría del aire. Orinar era un rito pequeño de dulzura en el campo.Juana Campo (Fisterra) |
S’accroupirSentir son poids chaud. Se tourner prévoyante la vue, et savoir qu’il n’y a personne. S’accroupir. Enrouler sa robe, laisser sur les genoux la toute petite blancheur de la toile, sa peluche Et la fronce qui embrasse la taille et l’aine Mouiller d’un jet doré, tiède et doux, la terre d’août si sèche, la détresse subtile des fourmis dans la pâleur piétinée des foins. Mêler son parfum mousseux avec la verte et dense vapeur de mai, ses légers murmures, la course effrayée des grillons. Et en hiver, élever un souffle de nuage réchauffé, aspirant la brise de la feuille froide de l’air. Uriner était un petit rite de douceur dans la campagne. Traduction Dany Fontaine |
Si mi voz muriera en tierra, Llevadla al nivel del mar Y dejadla en la ribera. Llevadla al nivel del mar Y nombradla capitana De un blanco bajel de guerra.¡ Oh mi voz condecorada Con la insignia marinera : Sobre el corazón una ancla Y sobre la ancla una estrella Y sobre la estrella el viento Y sobre el viento la vela ! Rafael Alberti |
Si ma voix meurt à terre portez-la au niveau de la mer et laissez-la sur le rivage Portez-la au niveau de la mer et nommez la capitaine d’un blanc bateau de guerre Oh ma voix décorée d’un insigne maritime : Sur le cœur une ancre sur l’ancre une étoile et sur l’étoile le vent et sur le vent la voile ! Traduction de Jean-Michel Maulpoix |
Una fiesta se hace con tres personas : uno baila, otro canta, y el otro toca. Ya me olvidaba de los que dicen Ole ! y tocan las palmas. Manuel Machado | Une fête se fait avec trois personnes L’un danse, L’autre chante, Et l’autre joue. J’oubliais ceux qui disent « Ole ! » et tapent dans les mains. Traduction de Dany Fontaine |
Le petit pêcheur de solitudeCaché sous le chapeau de jardinier de ton grand-père, tu pêches depuis l’aube. Le grand calme de la rivière berce ton rêve de poisson. Le bouchon file doucement. Filent aussi les heures, le vide temps de la journée. Tu ne sais plus, baigné dans l’absence des choses, si tu es venu pour pêcher, ou seulement pour être seul, dans le grand calme de la rivière… Claude Cailleau © Le Pré de la Roche |
El Pescadorcito de SoledadOculto bajo el sombrero de jardinero de tu abuelo, pescas desde el amanecer. La mucha calma del río mece tus ensueños de pez. Río abajo el sedal se va despacio. Se van también las horas, el tiempo hueco del día. Ya no sabes, bañado en la ausencia de las cosas, si has venido a pescar, o sólo a estar solo en la mucha calma del río… Traduction de François Beaugey |
Petit matinRéveillé. Comment ne pas l’être avec ce tapage, ce chahut d’oiseaux, enfants de l’aube, qui changent le ramage en joyeux tintamarre de lumière ? La frondaison du grand ficus est devenue folle de trilles. On dirait que c’est l’arbre feuillu, avec ses milliers d’ailes vertes, qui va se mettre à voler. J’entends la voix de ce végétal géant sortir des racines, secouer les branches, répandre dans l’air des ondes de joie. Symphonie ailée qui rend le ciel plus vaste et plus sonore. Me serais-je réveillé d’un rêve pour entrer dans un autre ? Traduction de Nicole Laurent-Catrice |
AmanecerDesperté. ¿ Cómo no hacerlo con este alboroto, con este estrépito de pájaros, hijos del alba, que convierten el gorjeo en estruendosa alegría de luz ? La copa del gran ficus ha enloquecido de trinos. Parece que sea el árbol frondoso, con sus mil alas verdes, el que va a echarse a volar. Oigo la voz de este gigante vegetal salir de las raíces, sacudir sus ramas, ondear en el aire su alegría. Alada sinfonía que hace más amplio y más sonoro el cielo. ¿ Habré despertado de un sueño para entrar a otro ? © Alejandro Duque Amusco |
Dans la mansardeCachée et protégée la bicyclette dort avec la rouille de ses nombreux hivers. Là elle résiste, fidèle, dans la pénombre, soigneusement conservée avec les autres outils. Elle avait un léger défaut, qu’à l’été suivant il fallait réparer avant tout. Quel bonheur de voler, courir avec elle, enfant léger sur les pédales, vers les jardins aux grenadiers de feu, sur le chemin de la fontaine…! Elle reste dans la mansarde, avec son allure de spectre, déglinguée et vieille. Elle attend un enfant qui n’est pas revenu. Un été long et froid les sépare. Traduction de Nicole Laurent-Catrice |
En la buhardillaTapada y protegida, en un rincón, la bicicleta duerme con la herrumbre de sus muchos inviernos. Allí resiste, fiel, en la penumbra, cuidadosamente guardada con los demás enseres. Tenía un ligero desperfecto, que al verano siguiente habría que arreglar antes de nada. ¡ Qué bien volar, correr con ella, niño ligero sobre sus pedales, hacia los huertos de encendidos granados, camino de la fuente…! En la buhardilla sigue, con su espectral estampa, destartalada y vieja. Espera a un niño que no ha vuelto. Un largo y frío verano los separa. © Alejandro Duque Amusco |
La guitareCommence le pleur De la guitare. De la prime aube Les coupes se brisent. Commence le pleur De la guitare. Il est inutile de la faire taire. Il est impossible De la faire taire. C’est un pleur monotone, Comme le pleur de l’eau, Comme le pleur du vent Sur la neige tombée. Il est impossible De la faire taire. Elle pleure sur des choses Lointaines. Sable du Sud brûlant Qui veut de blancs camélias. Elle pleure la flèche sans but, Le soir sans lendemain, Et le premier oiseau mort Sur la branche. Ô guitare ! Ô coeur à mort blessé Par cinq épées. Traduit de l’espagnol par Pierre Darmangeat, in Anthologie bilingue de la poésie espagnole, Editions Gallimard (La Pléiade), 1995 |
La guitarraEmpieza el llanto De la guitarra. Se rompen las copas De la madrugada. Empieza el llanto De la guitarra. Es inútil callarla. Es imposibile Callarla. Llora monótona Como llora el agua, Como llora el viento Sobre la nevada. Es imposibile Callarla. Llora por cosas Lejanas. Arena del Sur caliente Que pide camelias blancas. Llora flecha sin blanco, La tarde sin mañana, Y el primer pájaro muerto Sobre la rama. ¡ Oh guitarra ! Corazón malherido Por cinco espadas. Federico Garcia Lorca – Poema de la siguiriya gitana, in Poema del cante jondo, 1921 |
Tu contemples Le vent qui lève160px Une île sans rivière Une barque de feuilles. Tu te choisis des mains De lune ou de soleil. Tu sépares L’eau du ciel. Tu fais des pas A franchir les planètes. Tu effaces Le gris du monde. Jacqueline Held |
Tú contemplas el viento que se levanta una isla sin río una barca de hojas. Tu escoges unas manos de luna o de sol Tú separas el agua del cielo Tú das pasos que salvan los planetas Tú borras lo gris del mundo Traduction de François Beaugey |
Voltiger C’est marcher dans l’herbe Sans écraser un seul brin C’est plus facile d’être oiseau Mais quelle prison Ce ciel uniquement. Véronique Wautier douce la densité du bleu l’arbre à paroles 2002 |
Revolotear Es andar en la hierba Sin aplastar ni una brizna Es más fácil ser pájaro Pero qué cárcel Este cielo únicamente. Traduction de Dany Fontaine |
Pour atteindre l’ombre Il me suffit d’un arbre Pour approuver le vent Il me suffit d’une herbe D’un souvenir Pour que le ciel s’éclaire De ton regard Pour donner sens au monde. Hélène Cadou Retour à l’été – Maison de poésie, 1993 |
Para alcanzar la sombra Sólo necesito un árbol Para aprobar el viento Sólo necesito una hierba Sólo un recuerdo Para que el cielo se ilumine Sólo tu mirada Para dar sentido al mundo Vuelta al verano Traducido por Dany Fontaine |
Découvrir des poètes espagnols : Clara Janès José Luis Jover Julio Llamazares Miguel Hernandez Roberto Cabrera |
…sur sa tête une ombre repose et sur l’ombre une pierre et sur la pierre une ombre… Ernst Meister Espace sans paroi © Atelier La Feugraie | …auf dessen Kopf ein Schatten liegt und auf dem Schatten ein Stein und auf dem Stein ein Schatten… Ernst Meister Espace sans paroi © Atelier La Feugraie |
De très loin Un village nous sourit Il pense à l’été et la neige lui parle. Il pense à la nuit et l’aube déjà murmure à son oreille. Il vit très haut avec des branches et des paroles que parfois on oublie. Christian da Silva La fête de la vie – © Éditions En Forêt | Von sehr weit her lächelt ein Dorf uns zu. Es denkt an der Winter und der Schnee spricht zu ihm. Es denkt an die Nacht uns schon flüstert die Morgendämmerung ihm ins Ohr. Es lebt hoch oben mit Zweigen und Worten die man zuweilen vergißt. Christian da Silva Das Fest des Leben – © Verlag im Wald |
Beau Mauvais Le temps c’est la musique qui accompagne la ronde de la terre Jacques Canut La fête de la vie – © Éditions En Forêt | Schön Schlecht Das Wetter ist die Musik die den Tanz der Erde begleitet Jacques Canut Das Fest des Leben – © Verlag im Wald |
Un mot-clef Pour ouvrir La porte Il n’y a pas de porte Un mot Mais Pas de porte Pas un mur Pas une fenêtre Pour le ciel Tout est partout Ni dedans Ni dehors Ici Béance bleue. Hélène Cadou La fête de la vie – © Éditions En Forêt | Ein Schlusselwort Zum Öffnen Der Tür Das ist keine Tür Ein Wort Aber Keine Tür Keine Wand Kein Fenster Für den Himmel Alles Ist überall Weder drinnen Noch draußen Hier Blaues Klaffen. Hélène Cadou Das Fest des Leben – © Verlag im Wald |
SilberdistelSich zurückhalten an der Erde Keinen Schatten werfen auf andere Im Schalten der anderen leuchten. Reiner Kunze in “Un jour sur cette terre” © Cheyne éditeur (bilingue) |
Chardon argentéS’en tenir à la terre Ne pas jeter d’ombre sur les autres Être dans l’ombre des autres une clarté. Reiner Kunze Traduction de Mireille Gansel |
Bibliothekdie vielen Buchstaben die nicht aus ihren Wörten können die vielen Wörter die nicht aus ihren Sätzen können die vielen Sätze die nicht aus ihren Texten können die vielen Texte die nicht ihren Büchern können die vielen Bücher mit dem vielen Staub darauf die gute Putzfrau mit dem Staubwedel Ernst Jandl © éditions Gallimard – anthologie bilingue de la poésie allemande (La Pléiade, 1993) |
Bibliothèquetoutes ces lettres qui ne peuvent pa sortir de leurs mots tous ces mots qui ne peuvent pa sortir de leurs phrases toutes ces phrases qui ne peuvent pa sortir de leurs textes tous ces textes qui ne peuvent pa sortir de leurs livres tous ces livres avec toute cette poussière dessus la brave femme de ménage avec son plumeau © Ernst Jandl |
KinderliedEs brauchen die Kinder Ruhe Und brauchen keine Schlachten. Es nützen ihnen Schuhe Und Bilder zum Betrachten. Auf den Bildern soll nicht sein, Daß eines Menschen Blut verrint. Sonst glaubt leicht ein Kind, Blut vergießt sich wie Wein. Es brauchen die Kinder Frieden, Damit der sie lehrt, Ein Spaten auf Erden hienieden Ist mehr als ein scharfes Schwert. Günter Kunert © éditions Gallimard – anthologie bilingue de la poésie allemande (La Pléiade, 1993) |
La comptine des enfantsLes enfants ont besoin de repos Et n’ont pas besoin de batailles. C’est des chaussures qu’il leur faut, Et des images qu’ils regardent. Sur les images il ne faut pas Qu’on voie couler le sang d’un homme. Sinon l’enfant sans mal croira : Sang versé et vin, c’est tout comme. Les enfants ont besoin de paix, Qu’elle leur apprenne Qu’une bêche sur terre ici-bas Est plus qu’un glaive tranchant. Günter Kunert |
Soldat soldatSoldat, Soldat, wo geht das hin Soldat, Soldat wo ist der Sinn Soldat, Soldat, im nächsten Krieg Soldat, Soldat, gibt es kein Sieg Soldat, Soldat, die Welt ist ung Soldat, Soldat, so jung xie du Die Welt hat einen tiefen Sprung Soldat, an Rand stehst du. Wolf Biermann © éditions Gallimard – anthologie bilingue de la poésie allemande (La Pléiade, 1993) |
Soldat soldatSoldat dis-moi où ça nous mène Soldat dis voir que je comprenne Soldat soldat dans la prochaine Soldat tout le monde va perdre Soldat soldat on a le temps Soldat soldat écoute attends Le monde se paye une belle fêlure Et c’est toi qui es en bordure. Wolf Biermann |
Erziehunglaß das komm sofort her bring das hin kannst du nicht verstehen ser ruhig fas daß nicht an sitz ruhig nimm das nicht in den Mund schrei nicht stell das sofort wieder weg paß auf nimm die Finger weg sitz ruhig mach dich nicht schmutzig bring das sofort wieder Zurück schmier dich nicht voll sei ruhig laß das wer nicht hören will muß fühlen. Uwe Timm © éditions Gallimard – anthologie bilingue de la poésie allemande (La Pléiade, 1993) |
Éducationlaisse ça viens ici tout de suite amène-le t’entends pas va chercher ça tout de suite tu comprends pas du calme touche pas ça reste assis mets pas ça dans ta bouche ne crie pas veux-tu remettre ça où tu l’as pris attention retire tes doigts reste assis te salis pas ramène ça tout de suite te barbouille pas complètement du calme laisse ça quand on veut pas entendre on le sent passer. Uwe Timm |
…auf diesen Kopf ein Schatten liegt und aud dem Schatten ein Stein und auf dem Stein ein Schatten… Ernst Meister Wandloser Raum © Ateleir La Feugraie | … sur sa tête une ombre repose et sur l’ombre une pierre et sur la pierre une ombre… Traduit par Jean-Claude Schneider Espace sans paroi |
Le petit pêcheur de solitudeCaché sous le chapeau de jardinier de ton grand-père, tu pêches depuis l’aube. Le grand calme de la rivière berce ton rêve de poisson. Le bouchon file doucement. Filent aussi les heures, le vide temps de la journée. Tu ne sais plus, baigné dans l’absence des choses, si tu es venu pour pêcher, ou seulement pour être seul, dans le grand calme de la rivière… Claude Cailleau © Le Pré de la Roche |
Der kleine Fischer der EinsamkeitVersteckt unter Deines Großvaters Gärtnerhut angelst Du seit der Morgendämmerung. Die tiefe Ruhe des Baches wiegt Deinen Traum vom Fisch. Der Schwimmer fließt langsam. So zerfließen auch die Stunden, die Leere der Zeit des Tages. Du weißt nicht mehr, gebadet in der Entrücktheit der Dinge, ob Du gekommen bist, zu angeln, oder nur um allein zu sein an der tiefen Ruhe des Baches. Traduction de Françoise Jörgens-Bonnot |
La fin de la nuit d’étéLa tête du chardon se tourne vers les lumières au-dessus de l’eau. Un oiseau a écrit des signes dans les feuilles du frêne. Le poisson, autour des racines de roseau et de jonc, étale le rouge de ses nageoires. …/… Traduction de Jean-Claude Schneider |
Das Ende der SommernachtDer Distelkopf schlägt nach den Lichtern über dem Wasser. Ein Vogel hat Zichen geschrieben ins Eschenlaub. Um die Wurzeln von Schilf und Rohr legt aus der Fisch sein Flossenrot …/… Johannes Bobrowski extrait de Signes du temps © Atelier La Feugraie, 1992 |
L’eauTu parles encore, eau, tu parles, tu es venue par les fourrés, à pas menus, sous le vent ; lui, il cherchait les rivières, par-delà l’obscurité, et la barque où la lune voyage, dans le foin, tu l’as entendu dire : Voici les saules, voici la maison du hibou. …/… Traduction de Jean-Claude Schneider |
Das WasserDu sprichst noch, Wasser, du sprichst, du kamst im Gesträuch mit den kleinen Schritten unter dem Wind ; er suchte dir Flüsse hinter, det Finsternis und das Boot, darin des Mond fährt, im Heu, du hörest ihn sagen : Hier sind die Weinen, hier ist das Eulenhaus. …/… Johannes Bobrowski extrait de Signes du temps © Atelier La Feugraie, 1992 |
LassitudeJe suis las… J’ai conversé avec les arbres et j’ai souffert de la sécheresse avec les moutons. J’ai chanté dans les bois avec les oiseaux. J’ai aimé les jeunes filles au village. J’ai regardé là-haut le soleil. J’ai vu la mer. J’ai travaillé avec le potier. J’ai avalé la poussière de la route. J’ai vu les fleurs de la mélancolie sur le champ de mon père. …/… Je suis las… Traduction de Roland Hofer-Bury |
MüdeIch bin müde… Mit den Bäumen führte ich Gespräche. Mit den Schafen litt ich die Dürre. Mit den Vögeln sang ich in Wäldern. Ich liebte die Mädchen im Dorf. Ich schaute hinauf zur Sonne. Ich sah das Meer. Ich arbeitete mit dem Töpfer. Ich schluckte den Staub auf den Landstraße. Ich sah die Blüten der Melancholie auf dem Feld meines Vaters. …/… Ich bin müde… Thomas Bernhard Poemes © Librairie Séguier Archimbaud, 1987 |
Orages d’étéBruits de pluie sur un toit. L’humidité affleure et l’herbe pousse. Chaque jour des sectaires nous distillent d’épineuses questions d’identité alors qu’on s’efforce le matin dès l’aube et non sans mal, d’éloigner l’idée de mauvaise herbe Orages d’été, herbes des terres arables, des jardins, des landes et des marais. Je salue votre unique identité, celle du vivant, de la république des oiseaux. © Francis Krembel Le grand TOUT |
SommergewitterPrasseln des Regens auf ein Dach. Feuchtigkeit erscheint und das Gras wächst. Täglich verbreiten Fanatiker knifflige Fragen zur Identität wo wir doch seit Tagesanbruch und nicht ohne Mühe daran arbeiten die Vorstellung von Unkraut loszuwerden. Sommergewitter Gräser des Ackerlands der Gärten und Heiden der Sümpfe. Ich grüße euer gemeinsames Wesen das des Lebendigen der Republik der Vögel. © Francis Krembel das große Ganze |
Parler : remuer du vent écrire : remuer des mots travailler : remuer des choses voyager : se remuer. Clod’Aria |
Reden : Wind bewegen schreiben : Wörter bewegen arbeiten : Dinge bewegen reisen : sich bewegen Clod’Aria |
Bitte Bitte mein Herr Bitte mein Herr Elefant Bitte mein Herr Elefant seien Sie si freundlich Bitte mein err Elefant seien Sie si freundlich une nehmen Sie irhen linken Vorderfuß von meinem rechten Fuß. Danke vielmals. Michel Monnereau | Bitte Bitte mein Herr Bitte mein Herr Elefant Bitte mein Herr Elefant seien Sie si freundlich Bitte mein err Elefant seien Sie si freundlich une nehmen Sie irhen linken Vorderfuß von meinem rechten Fuß. Danke vielmals. Michel Monnereau |
Livre de chevet Toute la lumière du jour pliée dedans Monique Leroux-Serres | Buch auf dem Nachttisch All das Licht des Tages darin gefaltet traduction de Eleonore Nickolay |
Dans le vieil ormeau mort debout, Dans ce squelette à contre-ciel Qui tient tête au vent noir, Notre mémoire bat toujours. Il avait charge de ce monde, Nous mêlait à l’enfance des fables, A ses viviers d’étoiles tutélaires, A ces milliers d’oiseaux enfuis Par la brèche du temps. Il nous garde vivants Dans sa houle de songes. Il nous aide à tenir Encore un peu. Pierre Gabriel Pour un temps (L’Arbre à Paroles, Amay 1990) in La Fête de la vie – Editions En Forêt |
In der alten, aufrecht gestorbenen Ulme, In diesem vor dem Himmel aufragenden Skelett, Das dem schwarzen Wind trotzt, Schlägt unsre Erinnerung immer noch. Sie hatte die Welt zu hegen, Verband uns mit der Märchenkindheit, Mit ihren Fischteichen voll schützender Sterne, Den Tausenden von Vögeln, Die durch die Bresche der Zeit geflohen sind. Sie hält uns am Leben Im Wogen ihrer Träume. Sie hilft uns auszuharren, ein wenig noch. in Das Fest des lebens – Verlag im Wald traduction Rüdiger Fischer |
Déjeuner du matinIl a mis le café Dans la tasse Il a mis le lait Dans la tasse de café Il a mis le sucre Dans le café au lait Avec la petite cuiller Il a tourné Il a bu le café au lait Et il a reposé la tasse Sans me parler Il a allumé Une cigarette Il a fait des ronds Avec la fumée Il a mis les cendres Dans le cendrier Sans me parler Sans me regarder Il s’est levé Il a mis Son chapeau sur sa tête Il a mis son manteau de pluie Parce qu’il pleuvait Et il est parti Sous la pluie Sans une parole Sans me regarder Et moi j’ai pris Ma tête dans ma main Et j’ai pleuré. |
FrühstückEr hat den Kaffee gestellt in der Tasse Et hat die Milch in dem Kaffeetasse gestellt Et hat den Zucker in dem Milchkaffee gestellt Mit dem Teelöffel er hat gedreht Er hat der Michkaffee getrunken Und er hat die Tasse ausgeruht, ohne ein Wort zu sagen Er hat eine Zigarette angefeuert Er hat Kreise mit dem Rauch gemacht Er hat die Asche Hinter dem Aschenbecher gelegt, Ohne mit mir zu sprechen, Ohne mich anzusehen Er ist aufgestanden Er hat sein Hut auf seinem Kopf gelegt Er hat seinen Regenmantel gelegt Weil es regnete Und er ist im Regen gegangen Ohne Wort Ohne mich anzusehen Und ich habe mein Kopf in meinen Hände gegriffen Und ich habe geweint. |
Jacques Prévert | |
Découvrir des poètes de langue allemande : Björn Kuhligk Axel Kutsch Günter Kunert Manfred Hausin Franz Tumler Peter Handke Roger Bertemes Walter Helmut Fritz Hendrik Rost |
Cross (1) My old man’s a white old man And my old mother’s black. If ever I cursed my white old man I take my curses back. If ever I cursed my black old mother And wished she were in hell, I’m sorry for that evil wish And now I wish her well. My old man died in a fine big house. My ma died in a shack. I wonder where I’m gonna die, Being neither white nor black ? Langston Hughes traduction de Claude Held (1) cross c’est aussi la croix, c’est aussi la colère… (to be cross : être en colère) | Croisement Mon vieux est blanc Ma vieille mère est noire. Si j’ai jamais maudit mon vieux Je retire ce que j’ai dit. Si j’ai jamais maudit ma vieille mère Si je lui ai souhaité d’aller au diable Je regrette ce souhait coupable, Je lui souhaite du bien maintenant. Mon vieux est mort dans une chouette grande maison. Maman est morte dans une baraque. Je me demande où je vais mourir, Moi qui ne suis ni blanc ni noir ? Langston Hughes traduction de Claude Held |
Cabinets de jardin – été 1939 Siège en bois Récuré blanc Sent bon. Lumière diaprée Sous la porte Répand des ombres Sur le sol. Là rêve D’un premier amour À treize ans. Un œil Sur les étoiles, L’autre voit Les journaux Découpés proprement Accrochés À la porte Et lit : « Ceci ne signifie pas Que la guerre est inévitable ». e. e. cummings traduction de Claude Held | Privy in the Garden – Summer 1939 Wooden seat Scrubbed white Smells sweet. Dappled light Under the door Spills shadows On the floor. There dream of First love At thirteen. One eye On the stars. The other sees The news squares Neatly cut And hanging On the door And reads – « This does nos mean That war is inevitable ». e. e. cummings traduction de Claude Held |
oui est un pays charmant si est hivernal (mon aimée) ouvrons l’année tous deux voilà le temps rêvé (pas l’un ou l’autre) mon trésor, quand les violettes éclosent l’amour est une saison plus profonde que la raison ; ma douce (et avril c’est où qu’on est) e. e. cummings traduction de Claude Held | yes is a pleasant country : if’s wintry (my lovely) let’s open the year both is the very weather (not either) my treasure, when violets appear love is a deeper season than reason ; my sweet one (and april’s where we’re) e. e. cummings |
Quelque part dans cette bouteille d’encre il y a un ciel étoilé ! | Somewhere inside this ink bottle there is a starry sky ! |
Les jonquilles commencent à pousser près de la véranda. Une, Deux, Trois. Je pourrais être la quatrième ! Robert Sund Poème d’un lac qui se meurt © Corps Puce | The daffodils are up by the porch. One, Two, Three. I could be the next ! Robert Sund Poème d’un lac qui se meurt © Corps Puce |
Le petit pêcheur de solitudeCaché sous le chapeau de jardinier de ton grand-père, tu pêches depuis l’aube. Le grand calme de la rivière berce ton rêve de poisson. Le bouchon file doucement. Filent aussi les heures, le vide temps de la journée. Tu ne sais plus, baigné dans l’absence des choses, si tu es venu pour pêcher, ou seulement pour être seul, dans le grand calme de la rivière… Claude Cailleau © Le Pré de la Roche |
The little fisher of solitudeHidden beneath your grandfather’s gardening hat you have been fishing since dawn. The deep calm of the river cradles your dream of fish. The float glides quietly. Time also glides quietly away the vacant hours of the day. You no longer know, bathed in the absence of things, whether you came to fish or simply to be alone in the deep calm of the river. Traduction de John Millar |
L’oiseau du Colorado Mange du miel et des gâteaux Du chocolat et des mandarines Des dragées des nougatines Des framboises des roudoudous De la glace et du caramel mou. L’oiseau du Colorado Boit du champagne et du sirop Suc de fraise et lait d’autruche Jus d’ananas glacé en cruche Sang de pêche et navet Whisky menthe et café. L’oiseau du Colorado Dans un grand lit fait un petit dodo Puis il s’envole dans les nuages Pour regarder les images Et jouer un bon moment Avec la pluie et le beau temps. Robert Desnos in Destinée arbitraire (Gallimard) | The bird from Colorado Feeds on honey and cakes On chocolate and tangerines Dragées and nougatines Raspberries and hard candy Ice cream and soft caramel. The bird from Colorado Drinks champagne and syrup Strawberry squash and ostrich milk Chilled pineapple juice in a jug Blood from peaches and turnips Mint whisky and coffee. The bird from Colorado Takes a nap in a big bed Then flies away into the clouds To look at the pictures And to play for a while Come rain or come shine. Traduction Alain Boudet et Francis Hourquebie |
pour tous ces nuages mes deux épaules seront-elles assez solides ? Le vent retourne les corbeaux comme des ombres chinoises Monique Leroux-Serres | for all these clouds will my shoulders be strong enough ? crows turn over in the wind like Chinese shadow puppets traduction de Janick Belleau |
Tu entres au cœur de l’espace comme dans un nid où tu poserais tes ailes Un duvet de rose à tes pieds pour te consoler du poids de la terre Et toujours autour de toi cette douceur de l’air qui te dit que toute chose est habitable ici bas. Marilyse Leroux, Le temps d’ici, éditions Rhubarbe 2013 | You enter the core of space as you would a nest where to rest your wings A velvet of roses at your feet to comfort you from the weight of the land And always around you the sweetness of the air which tells you that every thing is habitable here below. Marilyse Leroux (From Le temps d’ici, éditions Rhubarbe, France 2013) – Traduction Eve Lerner |
Certains jours la lumière s’unit aux arbres pour une danse immobile en dehors de nous On aimerait glisser contre l’écorce et sentir monter en soi les veines de la terre Le jour nous confondrait dans ses feuillages nous serions la peau du ciel. Marilyse Leroux, Le temps d’ici, éditions Rhubarbe 2013. | Some days the light mingles with trees for a motionless dance outside of us One would like to huddle against the bark to feel throbbing inside the veins of the earth The day would confuse us with the foliage we would be the skin of the sky. Marilyse Leroux (From Le temps d’ici, éditions Rhubarbe, France 2013) – Traduction Eve Lerner |
Nous sommes de ce pays d’ici aux terres bleues dévorantes De ce rêve sans âge qui court sur la face nue des pierres De cette ombre toujours neuve à l’avant du jour Nous sommes de ce pays d’ici nos chemins sont nos racines nos pas herbes vivantes offertes à la magie de l’air pour une simple fleur de sang. Marilyse Leroux (Le temps d’ici, éditions Rhubarbe, France 2013) | We are from this country of devouring blue lands From this ageless dream running on the naked faces of stones From this shadow ever new just before daylight Our paths are our roots Our steps living grasses offered to the magic of the air for a simple flower of blood. Marilyse Leroux (From Le temps d’ici, éditions Rhubarbe, France 2013) – Traduction Eve Lerner |
Cette branche dans les fougères
était un cerf rouge
s’abritant de la pluie
*** Dans le silence vert et mouillé du bois de pins le cri noir du corbeau *** Absorbée par son travail ne disant mot – l’araignée |
That branch among the fern was a red stag sheltering from the rain *** In the wet green silence of the pine wood a crow’s black call *** Getting on with the job never saying a word – the spider |
Kenneth White – Trois haïkus extraits de L’Anorak du goéland – L’instant perpétuel 1987 – Traduction de l’auteur | |
Déjeuner du matinIl a mis le café Dans la tasse Il a mis le lait Dans la tasse de café Il a mis le sucre Dans le café au lait Avec la petite cuiller Il a tourné Il a bu le café au lait Et il a reposé la tasse Sans me parler Il a allumé Une cigarette Il a fait des ronds Avec la fumée Il a mis les cendres Dans le cendrier Sans me parler Sans me regarder Il s’est levé Il a mis Son chapeau sur sa tête Il a mis son manteau de pluie Parce qu’il pleuvait Et il est parti Sous la pluie Sans une parole Sans me regarder Et moi j’ai pris Ma tête dans ma main Et j’ai pleuré. |
BreakfastHe poured the coffee Into the cup He poured the milk Into the cup of coffee He added the sugar To the coffee and milk He stirred it With a teaspoon He drank the coffee And put back the cup Without speaking to me He lit A cigarette He blew some rings With the smoke He flicked the ashes Into the ashtray Without speaking to me Without looking at me He got up He put his hat On his head He put on his raincoat Because it was raining He went out Into the rain Without a word Without looking at me And I I took my head In my hands And I wept |
Jacques Prévert | |
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